Depuis les débuts de la finance décentralisée, la promesse de concurrencer les plateformes d’échange centralisées ne cesse de revenir au cœur des débats.
Si les DEX ont permis de reprendre le contrôle des fonds et de réduire les risques de censure, ils peinent encore à égaler la performance et l’expérience utilisateur des CEX.
Entre les interfaces fragmentées, la lenteur des blockchains, et la profondeur de liquidité insuffisante pour les produits avancés, l’utilisateur reste souvent contraint de jongler entre plusieurs plateformes pour réaliser son trading.
C’est dans ce contexte qu’émerge GTE, un exchange entièrement on-chain, conçu pour offrir une expérience unifiée de bout en bout, du lancement de tokens via son Launchpad au trading perpétuel.
Propulsé par MegaETH, un Layer 2 Ethereum nouvelle génération, GTE ambitionne de combiner la vitesse d’un CEX à la transparence et la sécurité d’un DEX.
Une architecture intégrée de bout en bout
L’approche de GTE repose sur un constat simple : aujourd’hui, un token doit passer par plusieurs plateformes différentes au cours de sa vie.
Il peut naître sur un launchpad comme PumpFun, être listé ensuite sur un AMM tel que Raydium, puis migrer vers un carnet d’ordres centralisé de type Binance. Cette segmentation génère de la friction, oblige les utilisateurs à manipuler plusieurs interfaces et à gérer des ponts cross-chain souvent risqués.
GTE résout ce problème en réunissant ces briques sous une même interface. Le processus débute avec un Token Launcher permissionless, permettant à n’importe quel utilisateur de créer et lancer un token sans autorisation préalable.
Le modèle repose sur une bonding curve où 80 % de l’offre est mise en vente tandis que 20 % est automatiquement brûlée. Dès que le seuil de bonding est atteint, un pool de liquidité est créé automatiquement sur l’AMM natif de GTE. Ce système permet un lancement équitable, sans allocation préalable à l’équipe ou à des insiders.
Parallèlement à ce mécanisme permissionless, GTE propose également un launchpad institutionnel en partenariat avec des projets sélectionnés.
Celui-ci intègre des vaults de staking on-chain, des mécanismes de vesting basés sur la durée de détention, et un cadre KYC afin de satisfaire aux exigences réglementaires croissantes.
Après sa mise en marché, le token transite sur l’AMM calqué sur le modèle Uniswap V2. Il peut ensuite évoluer vers une plateforme d’échange on-chain avec un carnet d’ordre centralisé (CLOB) dès lors qu’il atteint un certain seuil de maturité et de profondeur de marché.
Grâce à cette fluidité entre AMM, CLOB spot et CLOB perpétuels, GTE permet une montée en gamme naturelle des actifs, tout en maximisant l’efficience du capital et la découverte de prix.
Enfin, un aggregateur de prix intégré permet de router automatiquement les ordres au meilleur prix en comparant les différentes sources de liquidité (AMM, CLOB, autres DEX concurrents disponibles sur MegaETH comme Valhalla). Cette fonctionnalité est accessible à la fois depuis l’interface utilisateur et via une API dédiée aux développeurs, ce qui ouvre la porte à l’intégration dans d’autres dApps ou dashboards.
MegaETH : un socle technologique pour la performance temps réel
La promesse de GTE repose en grande partie sur les performances de sa blockchain sous-jacente, MegaETH.
Ce Layer 2 EVM-compatible se distingue par une architecture radicalement différente des autres solutions de seconde couche.
Alors que la majorité des blockchains reposent encore sur des blocktimes de 250 à 500 millisecondes, MegaETH vise une production de blocs comprise entre 1 et 5 millisecondes.
Cette accélération permet d’envisager une exécution d’ordres en temps réel, avec des performances proches de celles observées sur des systèmes centralisés comme les exchanges Binance, Bybit, OKX etc. Du moins, sur le papier.
MegaETH repose sur un séquenceur centralisé, mais ultra-optimisé.
Celui-ci traite les transactions en RAM sans passer par des disques SSD, stockant l’état complet de la blockchain en mémoire pour réduire les latences.
Les transactions sont traitées de manière parallèle et priorisée, ce qui permet de réduire considérablement les temps de propagation et d’inclusion.
Cette structure hybride, couplée à une gestion modulaire de la disponibilité des données grâce à EigenDA, offre un niveau de scalabilité inédit.
En séparant l’exécution des transactions, la validation cryptographique et la diffusion des blocs, MegaETH permet de dépasser les limites imposées par les architectures classiques basées sur des nœuds uniformes.
Cette infrastructure ouvre la voie à ce que les développeurs appellent les “OMEGA apps” : des applications uniquement possibles sur MegaETH.
Il peut s’agir de jeux intégrant des agents autonomes pilotés par IA ou, comme dans le cas de GTE, d’un carnet d’ordres entièrement onchain, mis à jour plusieurs centaines de fois par seconde.
GTE vs Hyperliquid vs Binance
Alors qu’Hyperliquid a optimisé sa blockchain (Layer 1) pour le trading CLOB onchain, sa latence dans le meilleur des cas, avec colocalisation, est de 200 ms malgré son temps de bloc de l’ordre de 70 ms.
En revanche, le testnet de MegaETH fonctionne avec des blocs de 10 ms, et avec une colocalisation au niveau du séquenceur, GTE atteint une latence de ~15 ms de bout en bout — déjà un ordre de grandeur plus rapide.
À titre de comparaison, Binance offre une latence d’environ 5 ms pour les clients colocalisés. À mesure que MegaETH continue de réduire les temps de bloc, GTE sera bientôt aussi rapide que n’importe quelle CEX haute performance.
MegaETH y parvient en retirant le consensus du chemin d’exécution, grâce à une spécialisation des nœuds, permettant 1,7 Ggas/s, plus de 20 000 TPS, et des performances constantes même sous charge. Cela fait de GTE la première tentative sérieuse de proposer un CLOB entièrement onchain avec un niveau d’exécution équivalent à une CEX.
AMM ou carnet d’ordres ? GTE fait le choix de l’hybridation
L’un des points souvent négligés dans l’analyse des plateformes de trading onchain concerne la structure de marché elle-même.
La plupart des DEX reposent exclusivement sur des AMM, ce qui les rend efficaces pour des actifs peu liquides ou nouveaux, mais inadaptés aux actifs à forte capitalisation.
À l’inverse, les CEX utilisent des carnets d’ordres avec une priorisation price-time, qui permettent une meilleure découverte de prix mais exigent une mise à jour constante de la liquidité.
GTE fait le choix d’intégrer les deux modèles.
Son AMM, s’inspire d’Uniswap V2. Il permet d’amorcer la liquidité des nouveaux tokens issus du launchpad, en particulier les actifs dits long-tail comme les memecoins.
La simplicité de fonctionnement du modèle x*y=k permet une automatisation complète de la mise sur le marché.
En parallèle, GTE déploie un carnet d’ordres central-limit (CLOB) pour les actifs plus matures.
Contrairement aux implémentations historiques qui étaient trop coûteuses en gaz pour être viables onchain, GTE exploite les performances de MegaETH pour proposer une infrastructure efficace, où les market makers peuvent placer, modifier ou annuler des ordres avec une réactivité comparable à celle des échangeurs centralisés.
Ce système price-time-priority attire les acteurs professionnels du trading algorithmique, qui peuvent ainsi construire des stratégies complexes sans subir les frictions habituelles liées aux blockchains.
Il en résulte des spreads plus serrés, une meilleure profondeur de marché, et une réduction significative du slippage, même sur des ordres de taille institutionnelle.
Un DEX taillé pour les traders sophistiqués
Au-delà de l’infrastructure, GTE entend séduire une nouvelle génération de traders en proposant une palette complète de produits et de fonctionnalités avancées.
Les utilisateurs ont accès à un large éventail d’actifs spot, libellés en ETH, USDC, USDT ou capUSD (le stablecoin natif de MegaETH).
Les paires sont disponibles à la fois via l’AMM, le CLOB spot, et l’agrégateur de prix, ce qui permet d’optimiser l’exécution selon la stratégie et la taille de l’ordre.
Côté dérivés, GTE propose des contrats à terme perpétuels (perpetuals) adossés à ses propres indices spot ou à des oracles externes via Pyth et Redstone.
Les traders peuvent utiliser USDC, USDT ou capUSD comme collatéral, et toutes les positions sont réglées en USDT à la clôture. Les leviers disponibles varient de 3x à 50x, avec une gestion du risque basée sur des sous-comptes isolés ou croisés.
Le système de marge est entièrement onchain, et les appels de marge sont déclenchés en fonction de calculs reposant sur des indices composites résistants à la manipulation.
Le mark price, utilisé pour la valorisation des positions et le calcul du PnL non réalisé, est défini comme la médiane de trois sources : le prix oracle ajusté par une EMA glissante, le mid price observé sur GTE, et les prix moyens des perpétuels sur Binance, OKX et Bybit.
Cette approche réduit l’exposition aux manipulations de dernière seconde, en particulier dans les phases de volatilité.
Roadmap, équipe et token
Derrière GTE se trouve Liquid Labs, un collectif de développeurs et d’ingénieurs issus de grandes entreprises comme Nasdaq, Mastercard, AWS, Palantir, Morgan Stanley ou encore Bitstamp.
L’ambition initiale du projet était de construire un carnet d’ordres onchain réellement compétitif. Mais au fil du développement, l’équipe a étendu la vision pour faire de GTE une plateforme de trading complète, alliant performance, transparence et interopérabilité.
L’équipe a annoncé une levée de fonds de 25,9 millions de dollars, menée par le fonds d’investissement Paradigm qui a injecté à lui seul 15 millions en juin 2025.
Parmi les autres investisseurs figurent des acteurs reconnus comme Wintermute ou Robot Ventures.
Cette levée valide l’intérêt que suscite le projet auprès des figures majeures de l’écosystème.
À ce jour, GTE reste en phase de testnet, tout comme MegaETH. Les deux projets partagent une roadmap technique étroitement liée, avec un lancement du mainnet prévu pour la fin de l’année 2025.
D’ici là, l’ensemble des fonctionnalités évoquées précédemment devraient être déployées et pleinement opérationnelles.
Concernant le token, aucune information officielle n’a été communiquée à ce jour. Ni la date d’un potentiel airdrop, ni l’utilité future d’un jeton n’ont été confirmées par l’équipe.
L’économie du jeton GTE pourrait s’inspirer des modèles tokenomiques modernes des DEX, où les jetons sont souvent utilisés pour encourager la liquidité via des programmes de staking ou de yield farming. Étant donné que GTE opère sur MegaETH, un Layer 2 sur Ethereum avec une latence ultra-faible, le jeton pourrait également être utilisé pour interagir avec les dérivés ou via le LaunchPad de GTE. Cependant, sans données confirmées sur l’offre totale, la distribution ou les incitations, toute analyse reste spéculative.
Il est donc encore trop tôt pour anticiper son rôle dans la gouvernance ou dans le modèle économique du protocole.
Conclusion
En réunissant sur une seule interface les briques essentielles du cycle de vie d’un token, GTE offre une expérience utilisateur unifiée et cohérente, ce qui tranche radicalement avec la fragmentation actuelle du secteur.
Sa capacité à proposer un carnet d’ordres en temps réel, entièrement on-chain, pourrait marquer un tournant pour la finance décentralisée, à condition que les promesses techniques soient tenues dans la durée.
Le projet repose sur une infrastructure solide, MegaETH, dont les performances dépassent largement celles des Layer 2 concurrents.
Néanmoins, cette approche nécessite des compromis, notamment en termes de centralisation temporaire du séquenceur et de matériel serveur haut de gamme. L’adoption à grande échelle dépendra donc de la capacité de GTE à fédérer une base active d’utilisateurs et à maintenir la qualité de l’expérience utilisateur malgré la montée en charge.