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Dernière modification effectuée le 05.08.2023 21:19
Les gouvernements du monde se réunissent pour améliorer le dispositif de répression financière. Pour cela, ils utilisent différents organismes tels que le GAFI (le Groupe d’Action Financière – un système de gouvernance indirectement lié à l’OCDE et au G20), dont l’objet principal est de lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LCB-FT).
Récemment, le GAFI a publié des recommandations concernant les crypto-monnaies, contraignant les pays du monde à s’y plier. Les pays réfractaires à ces règles pourront être mis au ban de la finance internationale.
Dans l’UE, c’est le Règlement MiCA qui devrait reprendre les règles du GAFI visant les crypto-actifs. Cet encadrement est notamment supporté par la Présidente de la banque centrale européenne : Christine Lagarde.
Les recommandations du GAFI devront s’appliquer à l’ensemble des intermédiaires (les « VASP » : Virtual Assets Services Providers) opérant sur le marché des crypto-monnaies.
Note : On peut également lire le terme CASP : Crypto Assets Services Providers en fonction des juridictions, mais dans cet article nous resterons sur le terme VASP que l’on peut peut traduire en PSAN en France.
Parmi les règles obligatoires, on retrouve : un dispositif de gel des avoirs, une surveillance des flux entrants et sortants sur votre compte, la communication de vos données personnelles à des tiers lors de chaque transaction (Travel rules), la dénonciation des transactions suspectes à l’Etat, la vérification de la provenance de vos fonds, le contrôle de vos informations personnelles, la transmission de vos informations au fisc, la suspension de vos actifs si vous êtes enregistré sur la liste des sanctions, la possibilité de vous interdire le retrait de vos crypto-actifs sur certains portefeuilles et/ou vous interdire l’accès à certains crypto-actifs, etc…
Avec l’entrée en vigueur de cet arsenal de mesures, un VASP devra s’entourer de conseils professionnels du monde bancaire. Le coût de la conformité se chiffrera (au minimum) en dizaines et centaines de milliers d’euros chaque année. Les VASP devront se consacrer principalement à l’administration de la conformité, afin de se conformer aux injonctions de l’Etat.
Dans sa publication actuelle, le GAFI laisse le choix aux Etats d´interdire ou non les protocoles de finance décentralisée (la « DeFi » : Decentralised Finance), tels que Bitcoin. Le GAFI précise également que les règles dédiées aux VASP ne s’appliquent pas aux protocoles DeFi, du fait de l’absence d’intermédiaire (personne morale ou physique) susceptible d´y obéir. Les protocoles DeFi ne sont pas des VASP au sens du GAFI.
Cependant les règles du GAFI prennent pour cible les personnes physiques et morales qui pourraient détenir une « influence suffisante » sur un protocole DeFi. Ainsi, les entrepreneurs désireux de participer à l’élaboration de protocoles décentralisés pourraient se trouver menacés par cette définition.
Quelques exemples de personnes influentes sur un protocole DeFi : des développeurs Bitcoin Core, une personnalité comme Vitalik Butterin (co-fondateur d’Ethereum) ou encore Do Kwon pour l’écosystème Terra Luna.
En effet, les agents de l’Etat pourraient rechercher une faute de l’entrepreneur n’obéissant pas aux règles centralisatrices et qui disposerait d’un pouvoir de contrôle suffisant sur un protocole.
Cette définition du GAFI permettrait à l’Etat de requalifier de VASP les personnes (physiques ou morales) qui auraient une emprise (totale ou partielle) sur un protocole DeFi. Ces personnes devraient alors se soumettre à la loi bancaire. Elles feraient également l’objet de sanctions pénales pour exercice illégal d’activité réglementée de VASP.
Face à cette insécurité juridique, les entrepreneurs de la DeFi pourraient être poussés à rejoindre des juridictions plus favorables (crypto-friendly) afin de ne pas renoncer aux valeurs libératrices de la décentralisation.
Surtout, les entrepreneurs aspirant à ne pas tomber dans le piège de cette définition maximiseront de bout en bout la décentralisation des applications financières. Leur objectif étant de ne pas (re)tomber dans le vieux paradigme du circuit bancaire étatisé. Plus généralement ce mouvement s’inscrit dans la continuité induite par Satoshi Nakamoto au travers du Bitcoin.
À terme, les gouvernements rassemblés au sein du GAFI pourraient obliger les institutions financières (et les VASP) à vérifier systématiquement le paiement de l’impôt dû par les assujettis. Toute personne faisant l’objet de sanctions serait impactée, peu importe l’endroit du monde où elle se situe.
Également, les règles du GAFI doivent permettre de lutter contre le financement des terroristes, autrement dit, ceux identifiés comme étant les ennemis de l’Etat. Cependant, pour certains membres du GAFI, le financement du terrorisme s’apparente au financement d’un parti d’opposition, souhaitant concurrencer le pouvoir en place.
À cet égard, le GAFI travaille directement ou indirectement avec la majeure partie des gouvernements du monde, y compris les dictatures. Ainsi les règles du GAFI pourraient servir de vecteur pour réduire des populations en servitude.
Dans le pire des scénarios et à mesure de l’empilement de nouvelles règles toujours plus contraignantes, les VASP pourraient devenir les sous-branches d´un système orwellien, subordonnés à une autorité centralisatrice. Cette oppression serait combinée avec l´émergence de CBDC (« Central bank digital currencies ») tel que le yuan numérique permettant d´instaurer une surveillance et un contrôle total sur les échanges de la population.
Certains VASP pourraient s'empêtrer dans le formol réglementaire voulu par les banquiers centraux et supporter le fardeau des législations contredisant les principes émancipateurs de la décentralisation.
En tout état de cause les règles du GAFI ne peuvent s’appliquer par la contrainte qu’aux institutions bancaires de la finance centralisée (y compris les VASP), et ne peuvent en aucun cas s´imposer à des protocoles réellement décentralisés.
On peut parier que les utilisateurs et entreprises choisiront les protocoles décentralisés à mesure que l’offre s’étoffera, pour la raison que leurs propriétés disruptives deviendront immensément avantageuses par rapport à la finance traditionnelle.
Par essence, un protocole décentralisé tel que Bitcoin ne peut pas être assujetti à une juridiction particulière. Ces protocoles permettent au monde entier d’échanger sans frontière, selon les règles instituées par ces protocoles, qui sont universels, inarrêtables et en concurrence.
En maximisant la décentralisation, les critères d’affranchissement développés par Satoshi Nakamoto pourraient s’avérer particulièrement efficaces, disruptifs et vertueux.