- La DTCC lance un pilote inédit permettant de représenter onchain des droits sur des bons du Trésor américain, avec l’accord explicite de la SEC.
- Le test repose sur Canton Network et la plateforme ComposerX, une infrastructure permissionnée pensée pour les exigences institutionnelles.
- Cette initiative intervient alors que les Treasurys tokenisés approchent 9 milliards de dollars, contre 2,5 milliards un an plus tôt.
La tokenisation des actifs souverains franchit un nouveau seuil aux États-Unis. La DTCC, pilier invisible mais central des marchés financiers américains, a annoncé le lancement d’un pilote limité visant à représenter des bons du Trésor américain onchain. Une première historique : ces actifs resteront bien conservés dans les livres de la DTC, filiale de la DTCC, mais leurs droits de propriété pourront être convertis en tokens blockchain, avec l’aval explicite du régulateur.
Ce test, mené en partenariat avec Digital Asset et le Canton Network, fait suite à une lettre de non-action de la SEC. Le document autorise la DTCC à expérimenter la tokenisation de certains droits sur titres, dans un cadre strictement délimité. Autrement dit, Washington accepte pour la première fois que l’infrastructure cœur du marché obligataire américain touche à la blockchain, sans remettre en cause la structure existante.
Des Treasurys tokenisés, sans sortir du cadre réglementaire
Concrètement, les participants à la DTC pourront convertir leurs droits sur des bons du Trésor détenus par la chambre de compensation en représentations tokenisées. Les titres sous-jacents resteront inscrits sur le registre centralisé de la DTCC. Les tokens ne seront donc pas des titres indépendants, mais des miroirs numériques de droits de propriété existants.
L’objectif est clair : tester les bénéfices opérationnels de la tokenisation sans déplacer la garde, la conformité ou la certitude juridique qui font la force du système actuel. Le pilote doit démarrer au premier semestre 2026, avec une montée en puissance progressive si la demande et le cadre réglementaire le permettent.
Canton Network, la blockchain choisie par Wall Street
Le projet s’appuie sur ComposerX, la plateforme interne de la DTCC, et sur Canton Network, une blockchain permissionnée développée par Digital Asset. Canton est conçue pour répondre aux exigences institutionnelles : confidentialité, transferts restreints entre acteurs autorisés et contrôles de conformité intégrés.
Ce choix n’est pas anodin. Il illustre la direction prise par Wall Street : une blockchain, oui, mais adaptée aux contraintes réglementaires, loin des réseaux publics permissionless. Brian Steele, président des activités de clearing et de services titres de la DTCC, résume la philosophie : permettre aux acteurs de bénéficier de la tokenisation tout en conservant les garanties juridiques et opérationnelles des marchés traditionnels.
Les Treasurys tokenisés, locomotive des actifs réels onchain
Ce test intervient dans un contexte de forte croissance des actifs réels tokenisés. Les bons du Trésor américains représentent désormais près de 9 milliards de dollars sous forme tokenisée, contre environ 2,5 milliards un an plus tôt. Une progression rapide, portée par la recherche de rendement en dollars combinée à des règlements plus rapides et programmables.
Jusqu’ici, ces produits étaient majoritairement émis par des gestionnaires d’actifs ou des fintechs. L’entrée en scène de la DTCC change la donne. Elle crédibilise l’idée que la tokenisation ne sera pas un marché parallèle, mais une extension progressive des infrastructures existantes.
Ce pilote n’est pas une révolution immédiate. Mais il envoie un signal puissant : la blockchain commence à s’intégrer au cœur du système financier américain, non pas en le contournant, mais en s’y greffant. Pour la finance onchain, c’est peut-être l’étape la plus stratégique à ce jour.