Getting your Trinity Audio player ready...
|
- La BCE met en garde contre une crise de la dette si la croissance n’est pas stimulée et les déficits maîtrisés, ciblant particulièrement l’Italie, l’Espagne, et désormais la France.
- Les coûts d’emprunt augmentent pour les dettes souveraines, rendant les refinancements plus coûteux. Les paiements d’intérêts pourraient dépasser 4% du PIB en France et 6% en Italie d’ici 2034.
- Une révision à la baisse des prévisions de croissance (1,3% en 2025) et la concentration des risques sur les marchés financiers exacerbent les tensions économiques et politiques dans la zone euro.
Des signaux inquiétants de crise de la dette en Europe émis par la BCE
Dans son dernier Rapport sur la stabilité financière, publié mercredi, la Banque centrale européenne (BCE) a tiré la sonnette d’alarme : la zone euro pourrait se retrouver confrontée à une nouvelle crise de la dette si des mesures ne sont pas rapidement prises pour stimuler la croissance, réduire l’endettement public et dissiper les incertitudes politiques. L’avertissement porte notamment sur la durabilité des dettes souveraines, un sujet que l’institution juge préoccupant au vu des niveaux d’endettement et des déficits budgétaires toujours élevés.
Le vice-président de la BCE, Luis de Guindos, a souligné la faiblesse historique de certains États membres à respecter les règles fiscales de l’Union européenne. Ces failles, combinées à des facteurs comme la faible productivité et des perspectives économiques en berne, exacerbent le risque de tensions sur les marchés financiers.
L’Italie et l’Espagne sous pression, la France en ligne de mire
Bien que les coûts d’emprunt de pays comme l’Italie et l’Espagne restent inférieurs aux sommets atteints lors de la crise de la dette de la décennie précédente, les inquiétudes des investisseurs se déplacent désormais vers d’autres économies majeures, comme la France. En octobre, l’écart entre les rendements des obligations françaises à 10 ans et ceux de l’Allemagne — indicateur clé du sentiment des marchés — a frôlé les niveaux observés avant les élections parlementaires françaises de l’été dernier.
Selon De Guindos, les marchés prêtent une attention croissante aux risques fiscaux. Les coûts de financement des pays dont le ratio dette/PIB dépasse 100% ont particulièrement augmenté lors des récents épisodes de volatilité, rendant ces économies encore plus vulnérables aux chocs.
Des dettes difficiles à refinancer dans un environnement de taux élevés
L’analyse de la BCE met également en lumière un défi structurel : les dettes souveraines arrivant à échéance doivent être refinancées à des taux d’intérêt bien plus élevés qu’auparavant. À titre d’exemple, les paiements d’intérêts de la France pourraient dépasser 4% du PIB d’ici 2034, tandis que ceux de l’Italie approcheraient les 6%, selon les estimations européennes. Une telle évolution compliquerait le financement d’investissements stratégiques, notamment dans la défense et la transition écologique.
Ces difficultés financières s’accompagnent d’une révision à la baisse des prévisions de croissance. La Commission européenne anticipe désormais une croissance de seulement 1,3% en 2025 pour la zone euro, accentuant le fossé économique avec les États-Unis.
Des marchés financiers fragilisés
Au-delà des dettes publiques, la BCE pointe une concentration des risques sur les marchés financiers, exacerbée par des valorisations élevées et une volatilité accrue. Les corrections récentes n’ont pas dissipé les craintes liées à une possible bulle spéculative alimentée par l’intelligence artificielle, ni à des ajustements brutaux sur les marchés obligataires et actions.
Dans un scénario de ralentissement économique, les bilans des banques et des fonds d’investissement pourraient être durement impactés. Avec des taux d’intérêt élevés, entreprises et consommateurs européens peinent déjà à faire face à leurs engagements, augmentant les risques de pertes sur le secteur immobilier commercial, particulièrement exposé.
Une décennie à risques pour la zone euro
La BCE avertit que le double fardeau d’une croissance faible et d’une dette publique élevée pourrait entraver durablement la capacité des gouvernements européens à répondre aux défis du XXIe siècle. Les leçons de la crise précédente, marquée par l’intervention historique de Mario Draghi, semblent s’éloigner alors que la zone euro entre dans une période de fragilité accrue. La nécessité d’une action concertée entre politiques budgétaires et monétaires apparaît aujourd’hui plus critique que jamais.