- Roman Storm, co-fondateur de Tornado Cash, a été reconnu coupable d’avoir exploité un service de transfert d’argent sans licence, malgré l’aspect open source et non-custodial du protocole.
- Le jury n’a pas retenu les accusations plus graves de blanchiment d’argent et de violation de sanctions, illustrant les limites de la preuve et un débat juridique complexe.
- Cette décision crée un précédent inquiétant pour les développeurs Web3, en les exposant à des poursuites pour les usages illicites de leurs outils open source.
Le couperet est tombé à Manhattan. Roman Storm, l’un des développeurs de Tornado Cash, a été reconnu coupable d’avoir exploité une entreprise de transfert d’argent sans licence. Mais le jury n’a pas réussi à trancher sur les deux accusations les plus lourdes : blanchiment d’argent et violation de sanctions internationales. Un verdict en demi-teinte, mais qui envoie un message lourd de conséquences à l’écosystème crypto.
Un développeur jugé comme un banquier ?
Storm ne gérait ni plateforme centralisée, ni comptes clients. Il contribuait au développement d’un protocole open source de confidentialité financière. Pourtant, les autorités américaines ont estimé que cela suffisait à faire de lui un “money transmitter”, une qualification normalement réservée aux sociétés comme Western Union ou PayPal.
Ce point précis fait polémique depuis le début de l’affaire. Pour de nombreux juristes du secteur, dont Alex Urbelis de l’Ethereum Name Service, cette décision reflète une incompréhension profonde :
Le jury n’a pas saisi la différence entre un outil non-custodial comme Tornado Cash et une plateforme de services financiers classique. Ce verdict aurait dû être impossible.
Des accusations gravissimes… mais sans preuve suffisante
Storm était également accusé d’avoir aidé des cybercriminels, notamment le groupe nord-coréen Lazarus, à blanchir plus d’un milliard de dollars via Tornado Cash. Ces accusations, largement relayées depuis 2023, reposaient sur une logique redoutable : rendre les développeurs responsables des usages illicites de leur code.
Mais malgré quatre jours de délibérations et deux “Allen charges” (procédures visant à forcer un verdict), le jury est resté divisé. Le procès s’est donc conclu sur une seule condamnation, et un énorme point d’interrogation pour la suite.
Pas de prison (pour l’instant), mais la menace plane
Le parquet a tenté de faire incarcérer Storm immédiatement après le verdict, arguant de ses origines kazakhes et de sa prétendue capacité à fuir. Mais le juge Failla n’a pas été convaincue. Storm, citoyen américain vivant à Seattle et père d’une fillette de cinq ans, reste libre sous caution en attendant la suite.
« Il a toutes les raisons de rester et de se battre », a tranché la juge. Une phrase qui résume bien l’état d’esprit des défenseurs de Storm, déterminés à faire appel.
Le spectre de la jurisprudence Tornado Cash
Ce verdict arrive à un moment clé : une semaine seulement après que les développeurs de Samourai Wallet ont plaidé coupables dans une affaire similaire, pour éviter des peines plus lourdes. Le risque est grand de voir émerger une jurisprudence dangereuse pour les développeurs de logiciels open source.
Amanda Tuminelli, du DeFi Education Fund, dénonce une “accusation fondamentalement bancale” et appelle le nouveau DOJ sous Trump à abandonner les charges restantes. «!– /wp:paragraph –>
Le procès de Roman Storm n’est pas terminé. Mais une chose est sûre : l’enjeu dépasse largement son cas personnel. C’est toute la frontière entre liberté de coder et responsabilité pénale qui est en train d’être redessinée, à coups de marteau judiciaire.