L’UE soutient l’euro numérique, mais avec des plafonds stricts pour éviter une fuite des dépôts

L’Union européenne soutient l’euro numérique tout en imposant des plafonds stricts afin d’éviter une fuite des dépôts bancaires et de préserver la stabilité financière.
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  1. Le Conseil de l’UE soutient l’euro numérique mais valide des plafonds de détention pour empêcher une fuite massive des dépôts vers la BCE et préserver la stabilité bancaire.
  2. L’euro numérique est conçu comme un moyen de paiement, pas comme une réserve de valeur, afin d’éviter un choc sur le crédit et un resserrement monétaire involontaire.
  3. Ces limites sont critiquées car elles protègent le modèle bancaire existant et pourraient réduire l’attractivité de l’euro numérique face aux stablecoins privés, déjà largement en avance.

L’euro numérique avance, mais sous haute surveillance. Le Conseil de l’Union européenne a officiellement apporté son soutien au projet de monnaie numérique de banque centrale porté par la Banque centrale européenne, tout en validant un principe clé : plafonner les montants que les citoyens pourront détenir. L’objectif est clair. Faire de l’euro numérique un outil de paiement moderne, pas une alternative aux dépôts bancaires.

Ce signal politique est loin d’être anodin. Le Conseil, qui réunit les ministres des 27 États membres et co-légifère avec le Parlement européen, acte une convergence entre gouvernements et banque centrale sur l’architecture du futur euro numérique. Autrement dit, les prochains textes législatifs devraient intégrer cette logique de plafonds.

Un euro numérique pensé pour payer, pas pour épargner

Il s’agit d'empêcher l’euro numérique d’entrer en concurrence directe avec les dépôts bancaires. Si les particuliers pouvaient détenir un nombre illimité d’euros numériques, les dépôts pourraient être transférés instantanément des banques commerciales vers la BCE, en particulier en période de crise, ce qui accélérerait considérablement les bank runs.

Dans sa communication, le Conseil insiste sur la nécessité d’éviter que l’euro numérique devienne une réserve de valeur. Sans limite, les dépôts pourraient migrer massivement des banques commerciales vers la BCE, surtout en période de stress financier. Un scénario jugé dangereux pour la stabilité du système.

La crainte est simple : si les ménages peuvent détenir sans contrainte une monnaie centrale, perçue comme totalement sans risque, les banques perdent une partie de leur base de dépôts. Or, dans la zone euro, ce sont ces dépôts qui financent l’essentiel du crédit. Un basculement rapide vers l’euro numérique réduirait la capacité des banques à prêter, renchérirait leur coût de financement et agirait comme un resserrement monétaire non voulu.

Cette lecture est défendue de longue date par la Banque centrale européenne, qui compare explicitement ce risque à celui posé par les stablecoins privés.

Stablecoins dans le viseur, banques sous protection

La BCE a déjà pointé les dangers d’une adoption massive de stablecoins indexés sur le dollar, comme Tether (USDT) ou Circle (USDC). Selon elle, leur croissance pourrait provoquer des sorties de dépôts bancaires, affaiblissant une source de financement clé pour les établissements européens.

Pour certains observateurs, les plafonds sur l’euro numérique relèvent autant de la stabilité financière que de la protection du modèle bancaire. Une étude, étonnante, citée par des analystes estime qu’un euro numérique sans limite pourrait réduire le revenu net d’intérêts des banques de 7 % en moyenne, et jusqu’à 13 % pour les plus petites structures.

Un choix politique assumé, mais contesté

Les défenseurs du projet assument ce cadrage. Le message est limpide : l’euro numérique sera un rail de paiement, pas un compte d’épargne. Sans plafonds, la BCE devrait choisir entre rémunérer l’euro numérique, au risque de bouleverser la transmission de la politique monétaire, ou accepter une perte de contrôle sur les taux.

Les critiques, eux, y voient une innovation bridée. En limitant volontairement l’utilité de l’euro numérique, l’UE protégerait les acteurs historiques au détriment d’une véritable concurrence monétaire. Certains soulignent le contraste avec d’autres régions du monde, plus enclines à laisser les stablecoins privés jouer un rôle central dans les paiements globaux.

Comme l’a résumé Arthur Breitman, fondateur de Tezos, ces plafonds traduisent surtout la dépendance structurelle du système européen aux banques commerciales pour créer du crédit.

Un équilibre délicat à trouver

Au fond, le débat révèle la tension centrale des CBDC : offrir une monnaie publique numérique, sûre et moderne, sans fragiliser l’édifice financier existant. Pour la BCE et les États membres, les plafonds sont un garde-fou indispensable. Pour leurs détracteurs, ils risquent de transformer l’euro numérique en outil secondaire et limité.

Le compromis européen se dessine donc clairement : ‘innover‘, oui. Déstabiliser le système bancaire, non. Reste à voir si cet équilibre suffira à rendre l’euro numérique attractif face aux solutions privées déjà largement utilisées.

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